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  • Photo du rédacteurSolène Koch

Prémices d'une VAE pour être éducatrice

Dernière mise à jour : 13 mars 2021




À mes anciens collègues, à ce travail que j'ai aimé, à toutes ces lumières que j'ai accompagnées..


Au chômage depuis peu, j’ai entamé les démarches pour faire une Validation des Acquis de l’Expérience pour être éducatrice spécialisée. Comme mes parents, tiens ! Je crois qu’il n’y a pas de hasard. Je ne me destinais pas à travailler dans le social. J’y suis tombée, il y a 4 ans, malgré moi, et je m’y suis sentie, pour la première fois de ma vie, à ma place.


Cette VAE sera bien évidemment l’opportunité d’exercer un travail qui m’attire, mais aussi, je l’avoue, une petite revanche personnelle, sur mon mémoire de première année de master que je n’ai jamais achevé. Bien que j’avais choisi un sujet sorti de mes tripes, qui me passionnait, je n’ai pu en voir le bout, car j’étais dans un moment trop noir de ma vie. Je n’en avais pas la force, pas l’énergie. Aujourd’hui, j’ai le sentiment, que si c’était à refaire, je pourrais le faire avec une facilité déconcertante. Car les mots me viennent tous seuls. Je sais qu’une VAE est un exercice complexe, qui peut être éprouvant, mais je ne suis pas inquiète. Je sais que j’en suis largement capable. J’ai la chance d’être à l’aise avec les mots, de savoir donner forme à ma réflexion pour la coucher sur papier. Grâce à ma formation littéraire, je suis accoutumée à l’exercice de la dissertation qui demande avant toute rédaction de pouvoir ériger un plan solide. Et surtout, j’ai la chance aujourd’hui d’avoir tout le temps pour m’y consacrer, de ne plus engloutir une grande partie de mon énergie dans un travail émotionnellement très prenant. Je suis fin prête !


Voici les prémices d’une réflexion sur le public avec lequel j’aimerais travailler si j’étais éducatrice, ou plutôt le jour où je serai éducatrice, devrais-je dire.

J’ai aimé travailler en insertion avec les primo-arrivants (jargon pour désigner les migrants qui s'installent en France et dont la situation est régularisée depuis peu). Ils m’ont énormément apporté, humainement. Leur joie de vivre, leur éternel sourire, leur soif d’apprendre, leur reconnaissance mettaient au quotidien du baume au cœur. C’était facile de les accompagner, parce qu’ils avaient la hargne de s’en sortir. Évidemment, c’était parfois dur de recevoir leurs histoires de vie, à des années lumières de notre train de vie occidental. De se confronter à la cruauté, l’injustice qu’ils avaient traversées et qu’ils rencontraient encore parfois ici. Mais c’était facile, car avec ou sans nous, travailleurs sociaux, ils seraient arrivés là où ils désiraient. Nous étions juste là pour leur apporter les clés nécessaires, les connaissances qui leur manquaient sur la France pour faciliter leur insertion.

La difficulté est autre avec les jeunes français que j’ai eu la chance d’accompagner. Là encore, il faut être prêt à recevoir leur histoire, à encaisser la tempête qui règne dans leur esprit. Ils sont souvent bien plus perdus que les primo-arrivants qui ont déjà passé le plus dur en bravant la mort pour arriver jusqu’en France. Avec ces jeunes-là, le plus dur est à écrire. Et parfois, nous pouvons en écrire un bout avec eux. Il faut aussi accepter que des fois, nous ne voyons pas le fruit de nos efforts. Les primo-arrivants, nous arrivons à les emmener là où ils veulent, ou au moins, nous les aidons à accéder à la première étape du chemin qu’ils convoitent. À la fin de notre accompagnement, nous voyons, accompli, le but que nous nous étions fixés ensemble ou qu’ils s’étaient déjà fixés seuls. Alors qu’avec les français, bien souvent, ce but est beaucoup plus flou. Nous nous escrimons maladroitement d’en esquisser un avec eux. S’ils veulent s’en sortir, ils ne savent souvent pas comment. Il leur arrive même de douter qu’il soit réellement possible de s’en sortir, que c’est la chance des autres, qu’eux, ils n’en sont pas capables. Et parfois, lors de l’accompagnement, nous ne pouvons que chercher avec eux ce but, et finalement, nous manquons cruellement de temps pour commencer à passer à l’action. Ce n’est pas pour autant que le travail a été inutile. J’aime à penser, comme me le répétaient souvent certains collègues, que nous semons des graines. Que si nous ne voyons pas l’accomplissement du travail effectué avec ces jeunes, c’est peut-être que les graines germeront des années plus tard. Il était trop tôt, nous manquions de temps. Mais nous avons commencé avec eux à débroussailler l’immense fouillis de mauvaises herbes, de ronces, qui envahissent leur jardin intérieur. Le travail de désherbage à entreprendre est parfois trop colossal pour que nous puissions en venir à bout dans le temps qui nous est imparti. Il faut espérer qu’ils sauront poursuivre ce travail, qu’ils ne laisseront pas à nouveau les mauvaises herbes tout recouvrir, qu’ils sauront les déraciner, qu’ils feront la place pour cultiver leur jardin intérieur, pour enfin laisser germer les graines qui restaient étouffées par un environnement malsain, par les barrières qu’ils avaient érigées pour se protéger, par leurs doutes, par leurs déceptions… Alors, leur lumière pourra briller, celle que le bon travailleur social à mon avis, doit pouvoir déceler, même si elle est étouffée, encore incapable de briller. Celle lumière intérieure, que chaque être humain a en lui, qui peut être rayonnante de beauté, ou étouffée, invisible parfois… Voir ces lumières, parfois insoupçonnées, émerger… a été parmi les plus délicieuses expériences que m’ont offert mes années à l’école de la deuxième chance.


C’est ce travail que je veux faire, si je dois retourner à la vie active « classique ». Dur, certes. Mais stimulant, challengeant, riche. Je veux aider ces jeunes, ne serait-ce qu’à entrevoir la lumière qu’ils ont en eux.

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